Les Têtes hautes | Martin Thibault

 
MARTIN THIBAULT
Les Têtes hautes
176 pages / 17 € / Format : 13 x 20 cm / ISBN 979-10-95434-59-7
Paru le 10 avril 2025
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〈 Le livre 〉
Ils sont treize, tous ouvriers dans un même atelier, et il semble bien que ce nombre leur ait porté chance. Qu’ils soient jeunes ou plus vieux, habitants de quartiers populaires ou de banlieues pavillonnaires, militants syndicaux ou « jaunes », ils ont l’habitude de jouer régulièrement ensemble… Et, pour chacun, dans un quotidien souvent resserré autour du nécessaire, cette victoire bouscule le cours ordinaire de l’existence.
Rythmé par le travail à l’usine, Les Têtes hautes questionne autant la fidélité à soi et aux autres que la croyance dans les possibilités de transformer le monde, à travers les réflexions d’un militant qui navigue entre l’espoir d’y arriver et le sentiment d’un combat parfois vain.
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〈 Extrait 〉
J’étais à la bourre. Pris dans un de ces matins pénibles et pesants, trimbalé dans un train bondé et étrangement pressé d’aller m’enfermer.
La porte de l’atelier. Le vestiaire. Je me change en vitesse et essaye de ne pas me faire remarquer. De toute manière, la pointeuse le fera sans que le chef d’équipe ait besoin de s’en occuper. La tenue enfilée, je me dépêche de rejoindre mon poste.
Les copains sont déjà là, affairés. Avant que j’aie le temps de m’y mettre, une réflexion du contremaître m’attrape au vol. « Ça va, toi et les horaires ? Faut que tu changes de réveil. » Je ne dis rien, j’y vais. Je sais que si je commence, ça va être long, je vais gueuler et la colère ne va pas me lâcher de la journée, continuer à m’étreindre. J’ai du mal à redescendre dans ces cas-là, comme lors des réunions avec la direction. En face, ils sont froids, distants, te regardent avec condescendance. Dur de fissurer l’armure. Moi, je ne peux pas me retenir. Et en même temps, j’en ai besoin. Pouvoir gueuler pour leur rappeler qui ils sont et où on est, que contrairement à ce qu’ils annoncent sans cesse, on n’est pas dans la même barque. La suite est classique : « Faut se serrer les coudes, faire des efforts. » Mais, dans l’atelier, quand on voit Jeannot, soixante piges au compteur, voûté, qui boite à moitié à cause de ses problèmes de hanche, qui souffle dès qu’il prend l’escalier pour monter au réfectoire, on se dit qu’il en a déjà fait, des efforts.
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〈 À propos 〉 
« L’auteur aurait pu intituler son livre, « la lutte, à quoi bon ? » Entendez par là les luttes sociales bien sûr. Il est vrai qu’avoir touché le gros lot au loto va probablement bouleverser la vie de nos 13 comparses, tous ouvriers précaires à l’usine du coin qui ont pour habitude de partager une grille chaque vendredi 13. La question se pose d’autant plus pour notre narrateur représentant syndical à l’usine. Face à une telle opportunité, comment rester fidèle, ne pas trahir, soi-même, les copains, ses idéaux, alors que la vie syndicale gèle l’évolution de carrière et que les conditions de travail poussent à fuir ? Des années de lutte et un pactole tombe, l’occasion de constater qu’on a aucun projet en vue car commencer à l’envisager n’est-il pas déjà glisser du côté des capitalistes ? Faut-il ne plus penser qu’à soi au détriment des grands projets qu’on avait pour le commun ? Puis toutes les nouvelles certitudes se renversent quand surgit un autre événement, tragique ou heureux.

Le récit de Martin Thibault trouve évidemment un certain écho dans le monde ouvrier contemporain, dans la militance et le syndicalisme actuels, et plus largement en chacun de nous. Jusqu’où défendre une cause collective, et le découragement alors, les empêchements parfois, dans un monde où l’on ne débat plus au café à la sortie du bureau ou de l’usine, mais anonymement sur X ou Facebook… »
Libraire L’Alternative Neuilly-Plaisance
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Aimé par la libraire L’Envers et l’Endroit Blanquefort
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Aimé par la Libraire Café Crécy-la-Chapelle
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