Visions d’elle | Denitza Bantcheva

DENITZA BANTCHEVA
Visions d’elle
200 pages / 18 € / Format : 13 x 20 cm / ISBN 979-10-95434-31-3
FRANCE
Paru le 11 mars 2021 
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< Le livre >
« Elle existerait près de moi, sur du papier, sous cette forme-là. Je m’en contenterais, me rappelant que cela tenait du miracle plus que tout autre écrit réussi. »
Très vite après la disparition brutale de sa mère, à Sofia, en Bulgarie, où elle était née et avait vécu, Denitza Bantcheva commence à retracer son parcours, persuadée que si sa fille unique n’écrivait rien sur Annie, « sa vie n’aurait en définitive aucun sens ». Elle en vient alors à confronter diverses visions d’elle — sous des angles qu’elle découvre parfois — qui composent le portrait d’un être rare, dont le destin témoigne cependant des épreuves les plus communes qu’on pouvait subir sous un régime totalitaire, comme au cours des années qui suivirent la chute du Mur de Berlin.
L’histoire familiale, l’histoire tout court et la réflexion sur le sens d’une existence s’entrelacent dans cet émouvant récit issu du deuil, et de l’amour d’une fille pour sa mère.
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< Extrait >
« La plus ancienne photo d’Annie ornait encore le buffet familial du temps de mon adolescence. On y voyait un bébé rond et rieur, aux yeux “noirs comme des olives”, selon le commentaire attendri que sa mère faisait toujours en montrant cette image. Sur d’autres clichés, elle rit dans les bras de ses parents ; Florence est rayonnante, quoique maigre et les traits creusés (depuis sa fausse couche, expliquait-elle) ; Dédé, menu et déjà chauve, s’abstient virilement de sourire, mais tout son aspect — visage, geste et posture — exprime le contentement. Ils n’auraient pas d’autres enfants : pauvres et sûrs de le rester, ils jugeaient immoral de procréer d’abondance (comme leurs parents l’avaient fait). Leur fille resterait unique pour grandir et vivre mieux qu’eux-mêmes. Ce choix leur donnait le sentiment d’être des personnes évoluées, qui allait de pair avec la vague conviction que les générations suivantes le seraient encore plus — car les parents d’Annie, ce couple de petites gens incultes, croyaient à leur manière au Progrès, le mythe de leur époque, tout aussi fermement qu’ils croyaient, par tradition ancestrale, que le sens de la vie, ce ne pouvait être rien d’autre que vivre, procréer et mourir content d’avoir des petits-enfants, voire — récompense suprême pour le devoir existentiel bien accompli — mourir en se réjouissant d’avoir pu bercer même les enfants de ses petits-enfants. »
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< A propos >
C’est un récit plutôt qu’une biographie  : Visions d’elle a pour trame un récit personnel, intime, traversé néanmoins par l’histoire d’un pays, d’un régime… Une étude de l’intérieur du totalitarisme ordinaire. « Ma mère s’est suicidée le 5 mai 2002, vers quatre heures et demie de l’après-midi. Sur le balcon du septième étage, on a trouvé une chaise dont le dossier était appuyé contre le parapet, et les pantoufles qu’elle avait ôtées, bien alignées du côté gauche du siège. » Le récit commence ainsi, clinique, comme une dépêche tombant sur le desk, une manière de mettre une distance vis-à-vis de l’inacceptable.
Le 23 octobre 2021, Denitza Bantcheva était l’invitée de Chroniques rebelles, sur Radio Libertaire.
« C’est l’une des choses que j’ai le plus de mal à admettre, qu’elle ait pu trouver qu’au fond ce n’était pas si grave que ça, le désastre qu’a été sa vie et le désastre qu’a été la vie de la plupart des autres gens qui étaient intelligents et doués, que le régime a détruits. (…) La grande majorité de ces gens ont été tués par le régime, souvent à petit feu, mais cela revient à être tué aussi (…) Et pour moi, c’est quelque chose d’absolument impardonnable, et je suis contente d’avoir pu survivre et d’avoir pu écrire au moins deux livres sur le sujet, l’un étant le roman La Traversée des Alpes, où je parle beaucoup de ces choses-là, et l’autre étant Visions d’elle. (…) Deux livres qui reviennent à faire comprendre ce qu’a été ce régime totalitaire, et comment ce régime a détruit des générations entières. C’est quelque chose que je trouve, non seulement objectivement parlant impardonnable, mais dont je suis absolument incapable de me consoler. » Denitza Bantcheva
Pour écouter l’intégralité de l’émission c’est ici →
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Sur le site lelitteraire.com, et après avoir consacré un bel article au livre (lire plus bas), Agathe de Lastyns s’entretient avec Denitza Bantcheva à propos de la genèse et de l’écriture de Visions d’elle.
lelitteraire.com : À la dif­fé­rence de vos romans et de vos autres fic­tions, ce livre est très per­son­nel. Vous expli­quez que vous avez voulu com­men­cer à l’écrire après le sui­cide de votre mère. Pourriez-vous expli­quer ce qui a déclen­ché le pro­ces­sus d’écriture ?
Denitza Bant­cheva : C’était d’abord l’idée que je ris­quais de conser­ver d’elle un sou­ve­nir qui serait, au fil du temps, de plus en plus déformé (éloi­gné de sa réa­lité vivante) et lacu­naire. L’idée d’écrire un récit à son sujet s’est impo­sée à moi avant même que je n’arrive à Sofia où je devais m’occuper de ses obsèques. Une fois sur place, j’ai décou­vert que beau­coup d’autres gens – à com­men­cer par ma grand-mère – avaient déjà com­mencé à relire sa vie de façon uni­voque, à par­tir de son sui­cide. Chaque cas de ce genre était comme une rai­son sup­plé­men­taire qui m’obligeait à me mettre au tra­vail au plus vite. J’avais l’impression, d’une part, que le monde qu’elle venait de quit­ter se rem­plis­sait à une vitesse ver­ti­gi­neuse de fausses images d’elle, et d’autre part, qu’il n’y avait plus rien à faire pour elle que d’écrire ce livre où elle habi­te­rait – si tou­te­fois j’arrivais à le mener à bien, ce qui me parais­sait assez peu probable.
Est-ce que le genre non fic­tion­nel vous a posé des pro­blèmes par­ti­cu­liers à l’écriture, à vous qui n’aviez écrit que de la fic­tion (si l’on excepte, bien sûr, vos ouvrages de cinéma) ?
C’est peu dire qu’il m’a posé des pro­blèmes. J’étais convain­cue d’être inca­pable de faire autre chose que de la fic­tion, en matière de récit. Je n’ai jamais pu, par exemple, entre­prendre d’écrire une bio­gra­phie, alors que j’avais les maté­riaux de base, notam­ment sur Jean-Pierre Mel­ville. Mon esprit fonc­tionne natu­rel­le­ment sur le mode de la fic­tion : ce qui nour­rit mon envie de nar­ra­tion, c’est jus­te­ment la liberté de trans­for­mer et d’inventer. Je m’en étais rendu compte au milieu des années 1990, lorsque le poète Niko­laï Kant­chev, qui était mon père spi­ri­tuel, m’avait pour ainsi dire intimé d’écrire ce qui allait deve­nir La Tra­ver­sée des Alpes, en disant : « Tu feras un livre sur tout ce que tu as dû tra­ver­ser et endu­rer pour deve­nir un écri­vain fran­çais. Demain, je quitte Paris, et tu te mets au tra­vail tout de suite. » Il m’a fallu plu­sieurs années avant de pou­voir vrai­ment m’y mettre – chaque fois que j’essayais, je me retrou­vais blo­quée après avoir rédigé quelques pages mort-nées –, et ce qui a fina­le­ment levé le blo­cage, c’était l’idée subite qu’en fait, per­sonne ne m’obligeait à faire autre chose que de la fic­tion, même si elle serait issue de choses vécues ou obser­vées, et même si la pro­ta­go­niste était cen­sée être « moi ». S’agissant de l’histoire de ma mère, c’était encore pire : je n’avais pas le droit moral de faire de la fic­tion, ni la moindre envie, puisque je vou­lais la « conser­ver » à tra­vers le livre. Je ne pou­vais ni trou­ver un ton qui me paraisse juste, ni même savoir où j’allais, en pre­nant des notes, puisque je n’avais pas la liberté de déve­lop­per telle ligne nar­ra­tive comme bon me semblait.
Ce livre n’est pas un récit chro­no­lo­gique de la nais­sance à la mort de votre mère. Pour­quoi ce choix et quels prin­cipes ont guidé la com­po­si­tion du texte ?
Au début (pen­dant trois, quatre, cinq ans), je n’ai fait que prendre des notes de façon désor­don­née, tout en sachant que le récit ne serait pas chro­no­lo­gique – la nar­ra­tion linéaire me répugne, d’instinct et parce que je la per­çois comme la plus arti­fi­cielle qui soit. Per­sonne ne vit de façon chro­no­lo­gique : à tout moment, le passé, le pré­sent et nos pro­jets pour l’avenir se mêlent dans notre esprit. La chro­no­lo­gie est tout juste bonne pour un cur­ri­cu­lum vitae, à mon sens ; sur­tout pas pour un récit ne serait-ce qu’un peu appro­fondi. Il m’a fallu beau­coup de temps pour trou­ver la com­po­si­tion appro­priée pour ce livre. Elle est basée en par­tie sur des « lignes de sens » (des épi­sodes nar­ra­tifs qui s’enchaînent selon telle logique pré­cise), en par­tie sur le prin­cipe des « décou­vertes » suc­ces­sives – à telle étape, je découvre telle chose ou il me vient telle idée inédite au sujet de ma mère -, et en par­tie sur des effets de contraste, par exemple entre deux moments assez éloi­gnés de son his­toire. C’est jus­te­ment la construc­tion très souple et variée du récit qui m’a per­mis de trou­ver assez d’intérêt au pro­ces­sus de son écri­ture, par com­pa­rai­son avec la fic­tion. C’était la part de liberté et d’inventivité qu’il me fal­lait pour me sti­mu­ler, en l’occurrence.
Avez-vous dû faire des recherches sur la vie de votre mère, ques­tion­ner des gens, ou vous êtes-vous appuyée uni­que­ment sur ce que vous saviez déjà ?
Mon idée ini­tiale, c’était d’écrire uni­que­ment ce que je savais déjà d’elle. Or, il se trouve que des gens qui l’avaient connue m’en ont parlé spon­ta­né­ment, peu de temps après sa mort ou des années plus tard. J’ai incor­poré au récit ce qu’ils m’ont dit. Il m’est aussi arrivé de faire, en feuille­tant ses archives, une ou deux décou­vertes inat­ten­dues, que j’ai uti­li­sées aussi. Mais la majeure par­tie du texte relève du témoi­gnage : c’est ma mère telle que je l’ai connue et telle qu’elle s’était racon­tée en me fai­sant des confidences.
Il y a dans le livre une dimen­sion très cri­tique envers le sys­tème com­mu­niste. Quelle res­pon­sa­bi­lité attribuez-vous au régime dans le sort de votre mère ?
Je pense qu’elle a été minée par ce régime, comme on peut l’être par une longue mala­die, à par­tir de ses seize ans, même si elle a résisté au pro­ces­sus de des­truc­tion avec beau­coup d’énergie, et même s’il y a eu des périodes où elle pou­vait se sen­tir net­te­ment mieux qu’auparavant. Elle n’aurait pas aimé être pré­sen­tée comme une vic­time, et ce serait trop réduc­teur de limi­ter son sort à cela, mais il n’y avait tout sim­ple­ment aucun moyen de res­ter indemne : toute per­sonne appré­ciable de sa géné­ra­tion, que j’aie connue en Bul­ga­rie (j’en parle à une cer­taine étape, dans le livre) a été empê­chée de s’accomplir plei­ne­ment, si elle n’a pas été car­ré­ment réduite à rien, conduite au sui­cide ou à une autre sorte de mort pré­ma­tu­rée. Le régime com­mu­niste, lorsqu’il dure presque un demi-siècle, comme en Europe de l’Est, ou davan­tage, comme en Rus­sie, détruit, déforme ou empêche d’avoir le sort qu’ils méritent, sur plu­sieurs géné­ra­tions, tous ceux qui n’ont pas la tour­nure d’esprit requise par le tota­li­ta­risme. Il a besoin de « bons citoyens », autre­ment dit, de créa­tures sou­mises, qui ne pensent pas par elles-mêmes, qui mou­chardent, qui marchent sur autrui et qui mentent comme elles res­pirent, y com­pris dans leur for inté­rieur. Le nazisme n’a pas eu le temps de pous­ser assez loin ce type de « réédu­ca­tion » de l’humain ; le com­mu­nisme, si.
Est-ce que vous pen­sez que ce livre consa­cré à votre mère vous a per­mis d’une cer­taine manière, si ce n’est de mieux la connaître ou la com­prendre, du moins de pré­ser­ver ce qu’il vous tenait à cœur de conser­ver de sa mémoire ?
Il me semble que dans une cer­taine mesure, je la com­prends mieux, mais c’est peut-être une illu­sion. Ce dont je suis cer­taine, c’est d’avoir réussi à conser­ver beau­coup de choses, parmi mes sou­ve­nirs d’elle, qui se seraient effa­cées déjà avant que je ne finisse de l’écrire, si je n’avais pas com­mencé à prendre des notes peu de temps après sa mort.
Fina­le­ment, est-ce que l’écriture de cet hom­mage à votre mère a été pour vous plu­tôt dou­lou­reuse ou vous a aidée à sur­mon­ter cette absence ?
Elle a été très dou­lou­reuse. J’ai tra­vaillé sur ce livre pen­dant seize ans (alors que La Tra­ver­sée des Alpes, quatre fois plus long, m’en a pris neuf) ; ce qui me ralen­tis­sait le plus sou­vent, c’était qu’après deux ou trois semaines consé­cu­tives d’écriture, je tom­bais dans un état de détresse qui m’ôtait la force de pour­suivre. Cela venait du contenu du récit. Plu­sieurs fois, j’ai déses­péré de jamais arri­ver à le finir, ce qui n’avait rien pour me remon­ter le moral, puisque je consi­dé­rais ce tra­vail comme un devoir filial. Je suis immen­sé­ment sou­la­gée d’en être venue au bout. Ce qu’il y a eu de plus récon­for­tant, depuis l’époque où j’ai com­mencé à l’écrire, c’est un épi­sode tout récent. Il se trouve que, par un concours de cir­cons­tances imprévu, comme on n’en inven­te­rait pas, mon édi­teur l’a fait impri­mer en Bul­ga­rie. Lorsque les pre­miers exem­plaires me sont par­ve­nus, j’ai subi­te­ment eu l’idée que ma mère avait en quelque sorte quitté Sofia pour vivre en France – comme on avait envi­sagé autre­fois qu’elle ferait.Cette incur­sion dans la non-fiction vous a-t-elle donné envie de pour­suivre dans ce genre ou est-ce que cela res­tera une incur­sion unique ?
Je pense que cela res­tera une incur­sion unique, même si l’on ne peut jurer de rien (jusqu’en 2002, j’étais cer­taine de ne jamais écrire le moindre livre de non-fiction).
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La Montagne 28 mars 2021
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« Visions d’elle est un livre formidable.
Comme dans un tableau il n’y a pas de chronologie et même si la lecture se déroule dans le temps, le fait d’entrer dans un moment puis dans un autre, dans un souvenir puis dans un autre, dans des lieux géographiques différents, dans un pluriel de visions donne l’impression de rencontrer cette unique mère qui fut la tienne et tu nous amènes à la respecter, à l’admirer et à l’aimer, en fait à la connaître. J’essayais pendant la lecture de me souvenir d’elle assise dans le jardin de Vera où je vous avais rencontré pour la première fois. Émotion, authenticité, affection et talent littéraire la font vivre de telle façon que tu m’as vraiment fait regretter de n’avoir rien su ni deviné d’elle à ce moment-là. »
Marina Kamena plasticienne
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« Éblouie il y a une quinzaine d’années par La Traversée des Alpes de Denitza Bantcheva, je me suis laissée tenter par Visions d’elle même si je ne lis que rarement des ouvrages non fictionnels. J’ai été bien avisée de me fier à cette auteure qui, décidément, ne me déçoit jamais, tant elle a une manière de voir les choses et de les raconter toujours extrêmement personnelle, originale et riche, tout en portant le lecteur à réfléchir. Et n’allez pas croire pourtant que l’émotion soit absente de ses écrits. Visions d’elle en est l’exemple le plus patent, qui est né d’un événement tragique de la vie de l’auteure : le suicide de sa mère.
Alors qu’on aurait pu s’attendre à un procès en règle de qui ou quoi avait poussé Annie ce geste, à une rationalisation de son existence destinée à expliquer le mystère irréductible de tout être humain, Denitza Bantcheva accomplit ici un véritable monument d’amour filial, cherchant à préserver tout ce qu’elle a pu conserver de sa mère afin que son existence ne se réduise pas aux interprétations ou aux récits fixés une fois pour toutes, que tel ou tel serait en mesure de faire d’elle.
L’entreprise est à la fois si simple et si complexe que le lecteur est emporté dans cette quête où la mémoire et la vérité concourent pour tenter de préserver ce qui fait le caractère unique et si fragile d’un être humain. Par la même occasion, on retrouve les préoccupations que Denitza Bantcheva développe à travers son œuvre, notamment le conflit entre l’individualité et les systèmes oppressifs en tous genres, le communisme en l’occurrence, puisque, faut-il le préciser, sa mère ayant passé sa vie en Bulgarie, elle a eu largement à souffrir des obstacles opposés par le régime à l’épanouissement de sa personnalité sensible.
Bref, on l’aura compris, je recommande chaudement Visions d’elle qui, au-delà de son écriture remarquable et de son intérêt propre, amène le lecteur à appréhender son entourage en essayant de se débarrasser de la manie interprétative. »
Reginalda lectrice
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« Rendre à une mère la part de vie qui a bel et bien été la sienne, qui ne se confond pas avec sa fin, celle d’une femme digne et courageuse qui s’est beaucoup battue, mais aussi relire les expériences de sa vie en quête d’une explication, d’une révélation, les désillusions étant de tous ordres, encore plus à l’ombre d’un régime oppressant. »
Françoise S. lectrice
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« J’ai fini le livre de Denitza Bantcheva qui m’a beaucoup émue. Je trouve que son écriture en fait un vrai bijou rare. Il y a une véritable qualité linguistique et narrative révélatrice à la fois du politique et de l’intime. Elle porte en elle une double mission qui n’est sans doute pas facile à vivre tous les jours. »
V. D. lectrice
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« Je viens de terminer ce très beau livre, sans nul doute le meilleur de Denitza Bantcheva. Il commence comme un coup de poing et vous tient sur la longueur. Livre personnel, qui dresse le portrait d’une femme à la fois forte et fragile, qui analyse la complexité des relations mère-fille et fille-mère et qui procède implicitement à une auto-analyse.
Livre témoignage, c’est également le portrait en creux d’un pays sous le joug communiste. »
V. L. lectrice
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« En tant que cinéphile, j’avais lu la monographie de Jean-Pierre Melville écrite par Denitza Bantcheva, à coup sûr la plus affûtée. Puis une œuvre de fiction, La Traversée des Alpes, au cours de laquelle le même Melville ressuscitait le temps d’un tournage sur un toit de Paris, m’avait révélé que l’historienne du cinéma était aussi une étonnante romancière. Visions d’elle est encore autre chose. Une tragédie personnelle a impliqué le renoncement provisoire à la fiction. C’est au départ un texte écrit pour survivre, sans souci de littérature ou de publication, un exorcisme, un essai de sauver de l’oubli ce qui peut l’être. Essai devenu — au fil d’une gestation de quinze ans et de phases alternées de travail intense, d’abandon du manuscrit, et d’envie de le détruire par dégoût et insatisfaction — un subtil et poignant portrait de la mère de l’auteure, sans complaisance ni pathos, en même temps qu’un récit lumineux de leurs liens de sœurs fusionnelles et qu’un glaçant témoignage sur l’art pervers d’un régime d’humilier et de broyer ceux qui lui résistent, même intérieurement. »
P. C. lecteur
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« Une si belle histoire d’amour filial
Denitza Bantcheva écrit pour le souvenir de celle qui lui a donné la vie. Pour qu’elle continue de vivre, en quelque sorte. Elle raconte une vie dans un pays sous dictature communiste, la Bulgarie, avec toutes les joyeusetés que cela implique, des tracasseries quotidiennes à la privation de libertés, à la méfiance, etc.
C’est un témoignage beau et émouvant, qui sait ne pas tomber dans le pathos et nous emporte du début à la fin. Une très belle découverte. »
Missef lectrice → lire l’intégralité de la chronique sur critiqueslibres.com
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« Un texte magnifique et poignant !! Merci de l’avoir publié ! »
paulineniloti lectrice Instagram
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« J’espère que tu (lettre adressée à l’éditeur) vas bien et que nous pourrons nous voir bientôt. Je pourrai alors te dire combien j’ai apprécié Visions d’elle (j’ai découvert Denitza Bantcheva à l’occasion de cette lecture). »
Aimée A. lectrice
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« Je viens de lire Visions d’elle de Denitza Bantcheva. Quel texte fort, original et poignant ! Merci beaucoup de l’avoir publié. »
Raphaëlle P. lectrice
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« Admirable et émouvant. Témoignage poignant du destin tragique d’une mère qui vit dans un pays totalitaire, la Bulgarie. Un histoire vraie qui temoigne de la rudesse d’une dictature et de l’amour d’une fille pour sa mère. Une femme remarquable, issue de parents pauvres et illettrés. Une femme qui s’est faite toute seule et que son pays a détruite. Une histoire difficile mais qui montre à quel point le régime communiste pouvait être destructeur. À la lecture on ressent ce que l’auteure exprime. J’ai dévoré ce livre. »
Much Critiques libres
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« Lecture d’une traite du magnifique Visions d’elle. L’ouvrage appartient au genre littéraire du tombeau, entremêlant biographie maternelle et écriture de l’intime. Dans une langue comme toujours incisive, Denitza Bantcheva rend compte de la lente érosion intérieure d’une femme d’exception bousillée par le communisme, qui s’y entendait en matière de saccage des destinées individuelles. »
Baptiste Roux Positif septembre 2021
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Un alliage rare
« Les édi­tions do, dont j’ai déjà recensé plu­sieurs ouvrages ici, confirment avec leur nou­velle publi­ca­tion la haute opi­nion que j’en suis venue à me faire d’elles. Il faut dire que je par­tais avec un a priori favo­rable, car Visions d’elle est un texte de Denitza Bant­cheva, auteure de romans et de livres de cinéma que j’ai aussi eu le plai­sir de lire (et de com­men­ter ici).Dans ce nou­vel opus, l’auteure aban­donne le roman et la mono­gra­phie pour un genre que je vais qua­li­fier, faute de trou­ver une for­mu­la­tion plus adé­quate, de biographie-témoignage.En 2002, la mère de Denitza Bant­cheva dis­pa­raît bru­ta­le­ment à Sofia, où elle était née et avait vécu, dis­pa­ri­tion qui déclenche immé­dia­te­ment l’envie d’écrire ce livre à sa mémoire. Ne vous atten­dez tou­te­fois pas à y trou­ver un récit chro­no­lo­gique d’une exis­tence, entre hagio­gra­phie et nos­tal­gie. Si Denitza a mis si long­temps à venir à bout de cette entre­prise, c’est qu’elle s’est moins atta­chée à rela­ter les péri­pé­ties de cette exis­tence qu’à recher­cher son sens.Annie est née dans la Bul­ga­rie des années com­mu­nistes et a dû mener sa vie tant bien que mal, en dépit des entraves insi­dieuses et redou­tables sour­noi­se­ment impo­sées par le sys­tème et relayées par la popu­la­tion. Esprit indé­pen­dant, elle a d’autant plus souf­fert d’être entou­rée de gens dont elle devait se méfier et qui lui étaient pour la plu­part hos­tiles qu’elle ne dis­po­sait pas de l’agressivité et de l’aptitude à contrat­ta­quer qui auraient pu lui faci­li­ter la vie.Le lec­teur fran­çais trou­vera de ce fait dans ce livre une plon­gée dans un contexte his­to­rique et social qu’il mécon­naît, quand il en soup­çonne seule­ment l’existence. Ce seul aspect de l’ouvrage mérite déjà le détour, mais il serait réduc­teur de ne voir dans Visions d’elle qu’un tableau sociologique. Car celle qui fait ce récit n’est autre que la propre fille d’Annie et le texte de Denitza Bant­cheva invite à s’interroger sur le degré de connais­sance que l’on peut avoir de ses proches et sur la part d’insondable de cha­cun.Par ailleurs, le lien filial intro­duit une dimen­sion poi­gnante dans le texte, qui en fait un alliage rare et d’autant plus remar­quable d’intelligence, de pro­fon­deur exis­ten­tielle et d’émotion qui fait monter les larmes aux yeux.Même si le genre est dif­fé­rent, on recon­naît l’écriture carac­té­ris­tique de l’auteure, certes moins baroque que dans La Tra­ver­sée des Alpes, moins iro­nique que dans À la rigueur, mais tou­jours riche et sub­tile, capable de sai­sir les nuances psy­cho­lo­giques et com­por­te­men­tales les plus ténues. Une lec­ture qui nous invite à poser pen­dant qu’il est encore temps un regard plus sen­sible et dénué d’a priori sur ceux qui nous entourent et que nous pou­vons perdre à tout instant. »
Agathe de Lastyns chronique publiée sur → lelitteraire.com
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« Un personnage très complexe, cette Annie ! Et qui possédait une sacrée force intérieure pour avoir résisté aussi longtemps. En Algérie poussait une fleur qui ressemblait énormément à l’anémone. Elle était très rouge et on l’appelait goutte de sang. Et, contrairement à l’anémone, elle était très résistante. J’en cueillais des brassées dans un champ. On les plaçait dans une large coupe avec de l’eau, on posait une lourde pierre au centre de la coupe sur leurs tiges et elles se redressaient, formant une couronne de gaieté. Annie me fait penser à cette fleur, cette anémone sauvage avec une lourde pierre posée sur sa tige et vivace quand même, et rouge comme le sang. »
Monique Raikovic écrivaine
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« « […] je n’écris pas sur elle, j’ai plutôt l’impression de vivre avec elle dans un temps, des lieux, où elle est vivante. » Annie Ernaux, Une femme, 1988. 

Les mots d’Annie Ernaux résonnent et décrivent à merveille toute l’incandescence qui irrigue Visions d’elle de Denitza Bantcheva, publié aux éditions Do. Dans cet hommage vibrant à sa mère, il est question d’amour filial, de sens, mais aussi de mémoire, une thématique creusée à partir de différentes strates. De l’ombre à la lumière « […] elle ressurgit constamment en mon for intérieur sous des angles si variés qu’il y aurait de quoi faire des portraits tant que je vivrai.[…] sa mort ne me semble plus vouée à l’effacer progressivement ni à déformer toujours davantage ma vision d’elle. Il se peut bien que ce soit une illusion, mais désormais, elle me tient, et j’en rends grâces. » Denitza Bantcheva, Visions d’elle, 2021 Si le paysage littéraire se voit actuellement traversé par une pléthore de récits cherchant à disséquer les relations familiales quel que soit leurs jours (Marie-Hélène Lafon, Camille Kouchner…) celui de Denitza Bantcheva s’emploie avec beaucoup de grâce et de retenue à déployer le fil d’une vie, celui de sa mère disparue tragiquement après avoir décidée de mettre fin à son existence. Tandis que Camille de Toledo se plongeait dans ses archives pour explorer l’histoire des siens sur quatre générations, une histoire douloureuse, traversée par la mort et le silence, dans les pages de Thésée, sa vie nouvelle publiées chez Verdier qui s’ouvraient sur une apostrophe forte et bouleversante adressée à son frère perdu et disant un même séisme ; Denitza Bantcheva prend le parti de décrire l’événement sans fioriture mais avec une grande dignité et délicatesse.  Elle se trouve à des milliers de kilomètres, dans l’Hexagone, lorsque la nouvelle lui parvient de sa Bulgarie natale. Ce point de départ et de rupture, servira d’amorce à Visions d’elle, qui sans verser dans le pathos, réalise une montée en puissance lumineuse, ressuscitant l’être aimée, à travers un portrait multifacettes et labyrinthique.  Auscultant cette tranche de vie, Denitza Bantcheva capture également les époques, saisissant les turpitudes qui les bousculent, les problématiques qui les traversent, leurs atmosphères plus ou moins obscures. De l’emprise du totalitarisme à la tombée du rideau de fer et du Mur de Berlin. Visions d’elle brasse un large éventail de questions, pouvant s’appréhender comme d’autres prismes à travers lesquels explorer les profondeurs de ce récit touchant. L’écriture comme chambre d’échos Comme l’autrice de La Traversée des Alpes le raconte au sein de son ouvrage, probablement l’un des plus intimes qu’elle ait rédigé jusqu’à présent, ce récit, il lui a fallu de longues années pour le bâtir, s’en détacher, le remanier avant de trouver le ton juste : « J’ai travaillé à ce récit, longuement, l’année de sa mort, je l’ai repris et complété l’année suivante, je l’ai abandonné — le trouvant insatisfaisant au point que le dégoût m’empêchait de m’y remettre — pendant cinq ans, puis j’ai décidé de le relire avant de le détruire, je l’ai retouché par endroits, j’y ai ajouté des faits que j’avais ignorés naguère, puis les développements qui s’imposaient, et j’ai eu l’idée que ce n’était pas vraiment grave qu’il soit à la fois insatisfaisant et bien plus incomplet que je ne le souhaitais en le concevant ». Le jeu en valait la chandelle.Avec souplesse et amplitude, la plume de Bantcheva, vient servir son propos pour mieux l’envelopper. On y perçoit l’amour que l’écrivaine voue à sa mère, tentant par son travail d’orfèvre, de lui ériger une dernière demeure majestueuse qu’elle continuerait à habiter en être de papier vers lequel l’autrice pourrait se tourner dès qu’elle en éprouverait le besoin : « […] ce devait être le livre où ma mère habiterait, et son portrait le plus exhaustif possible ; au bout de six ans, cette conception de la chose me paraissait absurde, car de toute évidence, ma mère restait (ou était redevenue) largement assez vivante dans mon esprit pour ne pas pouvoir tenir le cadre d’un portrait biographique, et pour continuer à m’inspirer des traits de personnages ou des épisodes de fiction tout comme elle le faisait avant sa mort. »On décèle dans l’écriture de Denitza Bantcheva, dans sa structuration, des accents cinématographiques qui lui viennent sans doute de sa passion pour le 7e art à laquelle elle a consacré beaucoup d’énergie ces dernières années, participant à de nombreux jury ou s’attelant notamment à la rédaction d’une monographie portant sur Jean-Pierre Melville ou encore d’une étude remarquée autour de René Clément et de son œuvre. Cet atout participe sans conteste à la modulation de l’intensité qui frappe Visions d’elle tout en lui conférant une certaine précision. Le lectorat appréciera également les descriptions accordant une large place aux détails et à l’aspect psychologique dans lequel l’autrice excelle tout comme son style efficace reconstruisant les aspérités comme les éclats. »
Karen Cayat → Pro/p(r)ose Magazine
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« Denitza Bantcheva est une voix particulière du champ romanesque et de la critique cinématographique en France. Depuis près de 30 ans, elle a investi ce double domaine avec un énorme talent. On passe volontiers en sa compagnie de la précision méticuleuse et savante de ses monographies sur Jean-Pierre Melville (Jean-Pierre Melville : de l’œuvre à l’homme – éditions du Revif), mais aussi René Clément et Joseph Losey, à la prose ensorcelante et décoiffante de son roman – fleuve La Traversée des Alpes (éditions du Revif 2006, à quand la réédition ?). Elle a encore d’autres cordes à son arc, que nous laisserons aux esprits curieux le soin de découvrir. Elle avait aussi animé en 2018 la rétrospective Melville que les cinémas Utopia et Polar en Cabanes avaient proposée à Bordeaux.Avec Visions d’elle, parues aux précieuses éditions bordelaises do, nous sommes dans un autre registre, et pourtant nous ne quittons pas les principes de sa démarche intellectuelle. En 2002, la mère de Denitza s’est suicidée à Sofia. Rentrée précipitamment en Bulgarie, son pays d’origine, la jeune femme organise ses obsèques, renoue des liens avec ses connaissances de là-bas, range son appartement et ses papiers, et dit-elle « l’idée me vint que tout ce qui me restait à faire pour ma mère, dorénavant, c’était de la raconter. »Ni roman, ni essai, ni livre de souvenirs, ce récit est un objet complexe à définir, tellement sa construction se dérobe à une approche résolument biographique. Livre d’amour, cela va de soi. Nous étions, dit la fille, « sans trop nous en apercevoir, ma mère et moi … en train de passer à l’état de sœurs siamoises. Oui, sœurs : vers mes treize ans, Annie [le prénom de sa mère] avait commencé à devenir adolescente par procuration. » Et ce lien si fort, elles le gardèrent jusqu’à la fin. Peut-être cette sororité est-elle une espèce de clef pour analyser l’itinéraire en miroir de la mère et de sa fille.Annie, issue d’un milieu très modeste, fut une élève et une étudiante extrêmement brillante, vouée à l’excellence. Mais gagner une place à la hauteur de ses capacités intellectuelles dans la démocratie populaire qu’était la Bulgarie d’alors ne fut pas chose facile pour elle, née en 1947. Dans les interstices de l’histoire de sa vie, soit racontée par elle-même à sa fille, soit dévoilée par les propos de ses proches-la famille, sa mère dite La Sauvage- un dictateur familial en bois brut- d’autres proches, ou encore révélée par certains documents après sa mort, on découvre le poids des services secrets du régime. Comme dans tout bon roman d’espionnage, Annie eut, durant ses études et aux moments cruciaux de sa vie professionnelle une sorte d’officier traitant, pour reprendre le lexique adéquat. Sans s’y appesantir, le récit met en avant sa droiture d’esprit, le sens qu’elle chercha toujours à donner à son existence. Et on découvrira toute la richesse si complexe des relations d’amour et d’amitiés qu’elle sut entretenir.Il nous faut enfin en conclusion dire ce qu’on a perçu de l’originalité de l’approche de l’écrivaine : comme ces négatifs qui sortis du bain dévoilent et fixent à jamais l’image, on dirait que des photos successives ajoutent et éclairent un portrait, doucement, subtilement, complémentairement. Et une femme vivante dans la prose passée, présente et à venir de l’écrivaine. »
Bernard Daguerre Aqui

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« Denitza Bantcheva n’est pas une inconnue pour les gens qui s’intéressent à l’histoire du cinéma, à la poésie et à la littérature bulgare : ils trouvent son nom depuis 1996 sur des couvertures d’essais, de poèmes et de proses et découvrent ce printemps sur les étals des Visions d’elle dont la couverture dévoile à peine le minois d’une très jolie jeune femme. C’est la première vision d' »elle », le personnage central du livre, Annie, la mère de l’auteure.
Disparue à Sofia dans des circonstances pénibles, Annie aura laissé à sa fille unique beaucoup d’elle-même et c’est cette dette d’intérêt, d’affection et de soins qu’elle paraît rendre dans ce livre touchant à un être étonnant dont le parcours vaut des explications et des hypothèses variées. Il faut annoncer qu’Annie, employée de différentes structures d’état, puis d’une maison d’édition, et finalement éditrice à son compte, a vécu les grandes années du régime communiste en Bulgarie, avec ses règles contraignantes et sa police politique omniprésente. Au point que sa fille choisit la fuite vers la France quand elle en eut l’occasion.
C’est avec la sensation d’avoir pu vivre la vie qu’aurait pu rêver sa mère que Denitza Bantcheva entame son livre. Récit d’un deuil, hommage à une disparue, éloge d’une femme remarquable, et remarquablement douée pour les choses de l’esprit, on trouve dans les pages de ce livre un long échange avec une mère-modèle parfois un peu secrète ou difficile à comprendre pour sa fille, ou pour la grand-mère Florence, toujours vive et directe, une énigme profonde — celle que nous sommes tous pour nos proches. Connait-on jamais les siens ? Et comprend-on toujours ce qu’ils trouvent à telle oeuvre, quelle interprétation ils forgent, quelle émotion ils éprouvent ?
On aurait des dizaines de fragments de cette aune à citer pour éclairer la finesse de ce dialogue de la vivante et de sa morte. Il frappe cependant que la survivante cherche au-delà de la compréhension des choix d’une mère — enjeu exorbitant — à donner un sens à son existence malgré son lot de déceptions professionnelles et amoureuses, d’opportunités gâchées ou de contraintes subies. Donner un sens à la vie de sa mère, femme tellement étonnante, en recueillant les traces, les signes, les mots pour contrer le passage du temps et l’effacement des traces…
Choix parfois incompréhensibles, empêchements administratifs ou sociaux, blocages familiaux, indépendance et ambitions, autant de mystères pour une fille, autant que pour sa grand-mère… Par hasard, la lecture consécutive d‘Une femme de Sibilla Aleramo (Des Femmes, 2021) et de Visions d’elle montre au moins une chose : si les époques et les régimes politiques changent, l’accès d’une femme à son destin propre, à celui qu’elle se choisit ou qu’elle croit devoir se choisir, n’est pas une mince affaire — et on me dira qu’il en est de même pour certains êtres mâles et on n’aura pas tort, notons cependant que la femme isolée est beaucoup plus soumise au poids des conventions, en particulier dans le monde ultra-policier du régime bulgare de la grande époque où chacun semble surveiller tout le monde et réciproquement. Sa fréquentation du grand poète Nikolaï Kantchev aura à ce titre valeur d’exemple pour les lecteurs occidentaux — Nikolaï Kantchev que Denitza a traduit pour la Librairie Bleue et pour L’Âge d’homme en 2000 et 2001, signe répété de son affection filiale.
Au fil des pages de ce magnifique témoignage d’amour, Denitza Bantcheva met noir sur blanc toute l’attention qu’elle portait et porte toujours à sa mère, rassemblant aussi précisément que possible les éléments mémorables de leur relation, et de la personne d’Annie elle-même, fétu porté par l’Histoire dont le trésor amassé de savoirs, de sensations, d’émotions et de plaisirs s’est effacé avec son dernier souffle, laissant le monde appauvri d’un être, inévitablement, mais un monde tout à coup enrichi grâce à ce magnifique hommage d’une nouvelle figure qui prend vie pour des lectrices et des lecteurs… »
L’Alamblog 
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« En matière de littérature contemporaine, je n’ai rien lu d’aussi convaincant sur les rapports entre une mère et sa fille. L’amour qui les liait, et leur complicité, sont frappants. Pourtant, rien n’est idéalisé. La figure de la mère, une femme exceptionnelle, qui s’est faite toute seule, étant issue de parents pauvres et illettrés, est très attachante, jusque dans ses erreurs et les défauts qu’elle se reconnaissait. Les épreuves qu’elle a subies sous un régime communiste donnent une idée précise de ce que l’indépendance d’esprit pouvait coûter même à quelqu’un de discret. Le lecteur découvre progressivement les causes de sa mort tragique, comme dans un roman à suspense, à ceci près que tout est vrai. Visions d’elle est à la fois un document historique et un témoignage personnel admirable. »
Banboun Babelio
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